3/h- Filles-mères et enfants naturels
LES
FILLES-MERES
Les religions imposaient aux
croyants un certain mode de vie. Tout écart par rapport à ces principes était
sanctionné. Un amour consommé avant le mariage était ainsi réprimandé par
l’Eglise. Les sanctions étaient importantes. Au XIXème siècle l’Eglise
entreprit même de les amoindrir, notamment pour les enfants naturels ( dont on
étudiera le cas dans la prochaine partie ).
Comme les filles-mères
« additionnaient » les tares aux yeux de l’Eglise, puisque, à la
fois, jeunes et célibataires, cette maternité en était que plus fortement
réprimandée. Pour amoindrir les faits, les parents de la fille, ainsi que le
curé, avaient pour objectif, souvent vain, de trouver le père.
Toute la communauté
villageoise ne faisait qu’un contre la future mère, littéralement exclue. Les
réunions villageoises, les Spinnstube, excluaient leur présence ; les
enfants du village s’en donnaient à cœur joie à s’acharner sur elle : ils
l’apostrophaient, l’injuriaient, etc.… Dans la région d’Engwiller, ces femmes
devaient même porter une couronne de paille sur la tête.
A cette oppressante sanction
villageoise, s’ajoutait la sanction ecclésiastique pour ces femmes
« pécheresses » par excellence, proies faciles de la méchanceté
humaine. Lors des messes, elles ne pouvaient plus s’asseoir aux côtés des
autres femmes ; en général un banc spécial leur était attribué, et portait
des noms tels que Anhengerbank ( banc de la remorque ), Huchebänkel ( banc des prostituées ), ou
encore Schandbänkele ( banc de la honte ), selon les
goûts régionaux.
Elles avaient
« droit » également à une admonestation publique faite par le pasteur
en personne, lors de la messe du dimanche bien évidemment devant toute la
communauté ; alors qu’elles n’étaient pas citées par le pasteur quand il récitait des prières à
l’attention des femmes enceintes dans la commune. Durant cet office, ces
futures mères célibataires devaient rester debout au premier rang, et payer, en
plus, une amende à la paroisse.
Elles n’avaient pas le droit
non plus à la cérémonie des relevailles et ne pouvaient plus devenir marraine
d’un enfant.
LES
ENFANTS NATURELS
L’enfant naturel, créé dans le
péché, n’a pas droit non plus à ces lettres de noblesse : on ne sonnait
pas les cloches de l’église lors de son baptême, qui avait lieu d’ailleurs, la
plus part du temps, après le culte. Le curé ou le pasteur choisissait son
prénom, tout en exigeant une taxe pour ce privilège obligatoire ; chez les
protestants, le nombre de parrains et de marraine pour un tel enfant était
divisé par deux, et le pasteur se permettait d’émettre des paroles spéciales
lors de la cérémonie.
Après le baptême, l’origine de
ces enfants les poursuivait encore puisqu’ils étaient affublés de surnoms, tels
que e Bankert ( le bâtard ), e Holzapfel ( mauvaise sorte de pomme ), ou
encore Rohjschäler ( pomme de terre de mauvaise qualité
).
De surcroît, une fille-mère
accouchant toujours d’un enfant naturel, beaucoup prenaient la décision, pour
elle et pour leur enfant, de déménager, ne pouvant plus supporter ce mépris
continuel.